Cas d’étude au Yverdon Sport – Quand sécurité rime avec respect

Cas d’étude au Yverdon Sport – Quand sécurité rime avec respect

« Nous témoignons aux ultras un respect dont ils n’ont pas l’habitude ». Ces mots, prononcés par Billy Warpelin, responsable sécurité d’Yverdon Sport, et repris par un journaliste du Temps le 13 février dernier, veulent tout dire. Son approche à contre-courant, qui prône l’échange plutôt que la répression, interpelle au point que l’homme collectionne depuis plusieurs mois les apparitions dans les médias. Découvrons comment ce professionnel hors normes a su juguler tout au long de la saison les hordes de fans venus soutenir leur club au Stade municipal d’Yverdon.

Le monde du foot est connu pour les débordements qui ont régulièrement lieu en marge des rencontres. Le match entre le Servette FC et le FC Zurich, le 6 avril dernier au stade de la Praille, en a livré un nouvel exemple. Au cœur de cette agitation, Billy Warpelin, responsable sécurité d’Yverdon Sport, étonne.  Son concept pour le moins novateur repose sur le dialogue, le respect et la confiance. Mis en œuvre au Stade municipal d’Yverdon depuis le début de la saison, il rencontre un franc succès : aucun dégât majeur à signaler et des fans qui repartent avec le sourire, comme en témoignent les nombreuses retombées médiatiques de ces dernières semaines :

  • article Le Temps du 13 février (Yverdon Sport-Servette FC)
  • article 24 heures du 12 mars (Yverdon Sport-FC Zurich)
  • intervention de Billy Warpelin dans l’émission Forum du 1eravril (Yverdon Sport-Young Boys)
  • reportage de l’émission Vacarme du 17 avril (Yverdon Sport-Grasshopper Club Zürich).

Le monde des bisounours, vous dites-vous ? Pas vraiment. Découvrez par vous-mêmes.

« À l’heure où les autorités misent sur la répression, l’ancien gendarme fait le pari de la confiance envers les fans visiteurs. Pourquoi ? Parce que si on prend tout de suite les ultras pour nos ennemis, ça n’aide pas au dialogue. » Forum, 01.04.2024

« Cet ancien gendarme dit avoir ‹ pris assez de cailloux à la sortie des matchs › pour juger inefficace la politique de répression des supporters ». Le Temps, 13.02.2024

Force est de constater que cette politique de répression n’a pas permis à ce jour d’éviter les débordements à répétition. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, la dynamique actuelle reste conflictuelle. Les ultras sont toujours plus violents, on essaie de les contraindre de manière toujours plus cadrée, avec pour résultat une opposition toujours plus forte. Ce que Billy Warpelin propose à la place ?

 

Une planification en amont basée sur le dialogue

Billy Warpelin contacte les fans visiteurs au minimum trois semaines avant la rencontre afin de discuter avec eux, comprendre leurs attentes tout en leur expliquant ses impératifs de sécurité. Son but ? Trouver une voie commune, identifier les valeurs qu’ils partagent et se mettre d’accord sur les modalités. Sur cette base, il leur fait parvenir une plaquette informative dans laquelle il leur explique en détail comment va se passer leur venue au Stade municipal et la raison d’être de certaines mesures de sécurité. L’inconnu crée de la tension, alors il informe.

« Un ultra, s’il a à boire, à manger et qu’il sait exactement où il met les pieds, il n’y a déjà pas cet effet de surprise, il n’y a pas cette tension. » Forum, 01.04.2024

Une démarche axée sur le respect et le sens de l’accueil

Billy Warpelin considère l’équipe adverse non pas comme des « visiteurs », mais comme des « invités ». Dans sa plaquette, il souhaite la bienvenue aux supporters, s’adresse à eux de manière personnalisée, amicale et respectueuse, utilise le verbe « pouvoir » plutôt que « devoir », le tout saupoudré d’humour.

« Le credo de base est d’enlever toutes les sources de tension avant l’arrivée des supporters. » 24 heures, 12.03.2024

Toujours dans cette notion de respect, Billy Warpelin s’adapte au code des supporters. Tout comme le capo est son seul interlocuteur du côté des ultras, il est leur seul interlocuteur du côté d’Yverdon. Si quelqu’un doit intervenir dans l’espace réservé aux visiteurs, ce sera lui, et lui seul. Jamais la police, qui se fait la plus discrète possible.

« Nous avons toujours pu aller dans le parcage, parce que nous ne sommes pas identifiés comme policiers. Nous sommes là pour aider et régler les problèmes. » 24 heures, 12.03.2024

Un pilier central : la responsabilisation

Si Billy Warpelin traite ses invités avec respect, il attend d’eux de la réciprocité. Il crée une relation d’échange. Ses propos repris par Le Temps et le 24 heures vont clairement dans ce sens :

« Cela a l’avantage de les renvoyer à leurs responsabilités : si ça part en sucette, ce sera uniquement de leur faute ». Le Temps, 13.02.2024

« Nous disons ouvertement aux supporters qu’ils ont leur carte à jouer. S’ils veulent foutre la m…, alors ils donnent raison aux autorités. » 24 heures, 12.03.2024

Et concernant les fumigènes ? Billy Warpelin sait qu’ils entreront, quoi qu’il entreprenne. Son rôle ? Prendre soin de la foule et faire en sorte que personne ne soit blessé. Autrement dit : responsabiliser.

« Nous sommes allés vers les ultras et nous leur avons simplement demandé de faire attention aux enfants et de s’éloigner des filets de protection. Et il n’y a eu aucun dégât. » 24 heures, 12.03.2024

 Il est vrai que les enjeux autour du club d’Yverdon, récemment promu en Super League, ne sont pas les mêmes que pour d’autres clubs suisses emblématiques. Aucune rivalité ancienne n’oppose par exemple les ultras d’Yverdon à d’autres ultras. La recette de Billy Warpelin est néanmoins intéressante car elle fait apparaître des aspects souvent négligés par les organisateurs d’événements et les forces de l’ordre. Notamment, comment offrir au public un accueil de qualité, assurer sa sécurité et lui garantir une expérience positive, y compris en présence de fans passionnés ?

« Le concept mis en place répond à ce qui déplaît aux ultras : on invisibilise les forces de police et de sécurité, on évite des fouilles intrusives. Nous cherchons à agir avec notre cerveau, pas avec les muscles. » 24 heures, 12.03.2024

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C’est exactement ce que nous traitons dans notre Certificat et Diplôme en sécurité événementielle et gestion de foule. Lors du module « Comportements anti-sociaux et gestion de l’ordre public », nous abordons – notamment au travers de l’exemple des manifestations sportives – le principe de l’identité partagée des personnes vivant une expérience commune au sein d’une foule. Ces individus vont développer un sentiment très fort d’appartenance au groupe et une grande solidarité. Si la Police ou la Sécurité s’en prend à un membre, cela génère une réaction collective hostile. Billy Warpelin – qui intervient lors de ce module – l’a bien compris. Pour éviter que tout le groupe se solidarise autour des semeurs de trouble, il dialogue avec les supporters et les met face à leurs responsabilités, désagrégeant en amont les sujets potentiels de conflit. La majorité des fans, raisonnables, se désolidarisent ainsi de la transgression.

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Crédit photos. En fin de rencontre, des ultras du Servette FC ont allumé des fumigènes, lors du match de leur équipe à Yverdon, le 11 février 2023. — © KEYSTONE/Salvatore Di Nolfi